SPORT SANTE – Claudia Tison : « Tu te dis presque que c’est le hockey qui te sauve la vie »

Claudia Tison, considérée comme une miraculée, se livre à coeur ouvert sur l’année 2022 qui marquera sa vie à jamais. Elle raconte son histoire, son combat contre la maladie, sa rééducation portée par son mental mis à rude épreuve et son envie de rechausser les rollers.

Claudia Tison est une ancienne hockeyeuse internationale française. Elle débute le hockey sur glace à 12 ans chez
les Gothiques d’Amiens, où elle évolue à la fois avec les filles et les garçons, avant d’intégrer l’équipe de France junior et sénior. Pour diverses raisons, elle quitte le haut niveau avant d’arrêter définitivement le hockey sur glace. Il y a deux ans, elle fait ses premiers pas dans le roller hockey, chez les Ecureuils d’Amiens, encouragée par François Caron, le président du club.

Au mois de février 2022, l’Amiénoise « commence à avoir une douleur à l’aine. Je me disais qu’il y avait quelque chose qui n’allait pas, je suis blessée, peut-être une pubalgie ». Mais deux semaines plus tard, la douleur était toujours présente. Après avoir consulté son médecin traitant, elle doit réaliser une échographie en urgence, « il y avait une masse qui était positionnée au niveau de l’ovaire. »

S’en suit une IRM qui révèle un cas beaucoup plus grave, on lui annonce qu’elle est atteinte d’un cancer. « Là c’est le choc ! A 30 ans ma vie a basculé en 3 secondes et demi. Je me suis pris le Titanic en pleine tête le 8 mars 2022. » C’est avec cette phrase puissante et imagée que Claudia Tison raconte avoir reçu la nouvelle, « personne n’est
préparé à recevoir ce genre de chose, et ce qui est bizarre c’est que je n’avais aucun symptôme, c’était juste irréaliste »

L’opération de la dernière chance

Mais pour Claudia Tison, les mauvaises nouvelles ne s’arrêtent pas là. Après une première opération, on lui annonce que son cas est « critique ». Elle effectue des biopsies qui sont ensuite envoyées à Lille, au centre Oscar Lambret. Le résultat tombe : elle est atteinte d’un pseudomyxome péritonéal, « un cancer rare qui touche deux personnes sur un million.»

Pour faire face à la maladie, Claudia Tison a effectué 200 heures de chimiothérapie. Au mois de mai, « je joue les
demi-finales avec 50h de chimio. J’ai continué de jouer au hockey, il fallait que je joue. Si tu as des objectifs, ça te
tient. »
Comme un symbole, c’est elle qui, à cinq secondes de la fin du match, inscrit le but de la victoire et qui envoie les Ecureuils en finale.

Il y a un chirurgien à Oscar Lambret qui était prêt à tenter l’opération de la dernière chance, sinon il me restait deux mois à vivre. »

Claudia Tison

Malheureusement, les effets de la chimiothérapie ne sont pas ceux escomptés et sa situation étant devenue trop critique, « ils ont pris la décision de m’opérer, on ne pouvait plus attendre, il y en avait partout. Le péritoine c’est la membrane qui protège les organes digestifs qui ne se retire pas. Pour beaucoup j’étais considérée comme inopérable, mais il y a un chirurgien à Oscar Lambret qui était prêt à tenter l’opération de la dernière chance, sinon
il me restait deux mois à vivre. »

Elle subit cette lourde opération, qui dure près de 13 heures, et durant laquelle plusieurs organes lui sont retirés.
« Au réveil on m’annonce que je suis vivante et que je vais m’en sortir. Tout le personnel d’Oscar Lambret et du
CHU d’Amiens m’appelle « Le petit miracle » parce que clairement, je ne devrais plus être là »
. Claudia Tison se retrouve avec une « énorme cicatrice allant du sternum au pubis ».

L’entourage et le hockey comme remède

Après cette nouvelle étape, une nouvelle embûche se dresse, « je ne sentais plus ma jambe gauche. Pendant l’opération, le nerf fémoral a été endommagé, les médecins n’avaient pas de délai à me donner sur la repousse de ce nerf, mais moi, je leur ai dit : À la fin de l’année, je suis sur des rollers ! »

Deux mois et demi après l’opération, la jambe de Claudia Tison ne se levait toujours pas, elle a travaillé avec Hélène Mellor, kinésithérapeute, « elle n’a rien lâché, elle y a toujours cru. Le choix des personnes qui t’entourent, c’est primordial. » À ses côtés également, Elgin Pearce, ancien joueur des Gothiques devenu naturopathe, avec qui elle travaille sur la nutrition et l’alimentation. Claudia Tison se dote d’un coach mental, Nikolaj Kielland de l’académie Raw Nations dont la phrase « développe l’athlète et tu perds l’humain, développe l’humain et tu développes l’athlète » lui a servi d’électrochoc.

Sa famille a été un soutien indéfectible, notamment sa mère qu’elle évoque avec émotion, « c’est mon plus grand pilier, elle a vu les backstages de ma maladie. Je dois aussi beaucoup au club des Ecureuils et à François Caron. Mon passage ici sera marqué à vie. » Claudia Tison explique que ce combat contre le cancer « est une question de mental, de tête et de coeur. Ce n’est plus le corps qui parle, si tu l’écoutes, tu restes couché dans ton lit alors, tu regardes autour de toi, tu te dis : je n’ai pas le droit de lâcher, même si c’est dur, relève la tête et bats-toi ! »

La résilience

L’Amiénoise trouve la force dans les valeurs du sport qu’on lui a inculqué « partout où je suis passée, et avec chaque coach, j’ai appris des choses. Le sport dans la maladie m’a clairement aidé, on m’a appris à gagner, mais aussi à avoir du coeur, si tu ne vis pas avec ton coeur, tu ne vas pas loin. » Son sport, le hockey, l’a aidé à tenir, « c’est une grosse partie de ma jeunesse, je pense que j’aimerais le hockey à vie, j’y ai mes plus beaux souvenirs. Tu te dis presque c’est le hockey qui te sauve la vie, sans cette blessure, le cancer me passait au travers. »

Désormais, Claudia Tison apprend à vivre avec « les séquelles » car malgré tout, elle peut « rejouer au hockey et ça, ça n’a pas de prix. » Depuis janvier les progrès sont énormes, « quand on me voit là ou sur le terrain, personne ne met un centime sur mon histoire. J’en suis consciente, la porte de sortie, je l’ai vue, et de près. Il y a une part de
miracle mais aussi beaucoup de travail. »

La hockeyeuse de 32 ans entame sa troisième saison sous les couleurs amiénoises avec les féminines en intégrant également l’équipe masculine en N3, une belle revanche sur la vie.

César Willot
Crédit photos : Kevin Devigne – Gazette Sports

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