SPORT SANTÉ : Commotion cérébrale, quand le sportif prend un coup sur la tête

Henri-Corentin Buysse a subi une commotion cérébrale le 17 janvier 2023 mettant un terme à sa saison avec les Gothiques d’Amiens. Une blessure loin d’être anodine, qui pousse le gardien international à réfléchir à la suite de sa carrière.

Il a suffi d’une fraction de seconde pour que sa saison bascule. Le 17 janvier, derby des Plaines, il reste dix minutes à jouer sur la glace du Coliseum, les Gothiques sont menés 5 buts à 1 et subissent les assauts répétés des Dragons de Rouen. Sur une énième offensive des Jaunes et Noirs, Lopachuk téléscope un attaquant rouennais pour protéger sa cage. L’attaquant biélorusse n’a rien, mais dans sa chute il a assené un violent coup de patin au casque de son gardien. Henri-Corentin Buysse reste au sol. Un médecin glisse tout de suite à son chevet et appelle une civière. Les premières nouvelles sont rassurantes. La lame ne l’a pas touché et certains prédisent même un retour rapide à la compétition du joueur star d’Amiens.

Lui ne se souvient de rien. “Je ne l’ai pas vu arriver. Blackout total. J’ai ressenti une douleur vraiment intense au niveau de la tête. C’est en voyant les images par la suite que j’ai su ce qu’il s’était passé”. Buysse souffre d’une commotion cérébrale. Conséquence d’un impact au niveau de la boîte crânienne. Pour ce type de blessure, la Fédération Française de Hockey sur Glace n’autorise pas un retour au jeu avant un délai de 7 jours, avec une autorisation médicale.

 “Je me suis écroulé. J’avais des fourmillements partout dans les bras, dans la tête. Impossible de parler. Le lendemain je suis resté 7h aux urgences.”

Henri-Corentin Buysse, gardien des Gothiques d’Amiens

Après quelques jours de repos, l’international français retourne progressivement à l’entraînement et réintègre le groupe le 31 janvier pour un déplacement à Gap. “Le matin ça allait très bien, se rappelle-t-il. J’avais vu le neurologue, il n’était pas très chaud pour que je rejoue mais je me sentais bien. Compétiteur et bête comme je suis, je voulais absolument rejouer.” Titulaire d’entrée de jeu, Buysse se sent fatigué dès la fin du premier tiers-temps et en informe sa doublure, Victor Bodin.

“Je sentais que sur la glace, c’était bizarre. À la fin du deuxième tiers, je suis rentré dans le vestiaire et je me suis écroulé. J’avais des fourmillements partout dans les bras et dans la tête. Impossible de parler. Le lendemain je suis resté 7h aux urgences à Amiens.” L’athlète de 34 ans a vécu la pire expérience de sa vie. “Quand on est rentré du déplacement, c’est comme si je venais de prendre la commotion.” Et avoue en définitive qu’il est remonté trop tôt sur la glace.

Les conséquences d’une commotion peuvent être terribles. “Il ne faut pas qu’il y ait de second traumatisme dans les huit jours car cela peut provoquer des séquelles dans les années à venir et les risques de démence sont démultipliés avec le vieillissement”, rappelle Marc Legent, médecin du centre de formation de l’Amiens SC. Dans les jours qui suivent, il préconise de “reposer le cerveau, donc il faut peu d’écrans et du sommeil”.

Plus d’un mois après le match de Rouen*, Buysse subit de plein fouet les symptômes du syndrôme post-commotionnel. Autrement dit, au quotidien, l’Amiénois a encore mal au crâne et aux cervicales. Quand ce ne sont pas les insomnies à répétition qui le gênent la nuit, ou la lumière et le bruit le jour. Les douleurs sont moins fortes qu’au début, mais elles persistent dans le temps.

Pourtant, celui qu’on surnomme “Riton” n’est pas un novice en matière de commotions. Il en compte cinq à son actif. “La première que j’ai prise c’était en 2010, un one-timer dans le front mais à l’époque on ne parlait pas de commotion donc ce n’était pas si grave que ça…” Jamais elle n’avait été aussi violente. 

Quand j’ai commencé ma carrière, il y avait une superstition comme quoi à six commotions il fallait arrêter.

Henri-Corentin Buysse, gardien des Gothiques d’Amiens

Le retour à une vie normale se fait pas à pas. Il existe aujourd’hui des solutions pour accélérer le retour à la performance. Comme après une blessure corporelle, il faut rééduquer le système neuronal. Grégory Marquet, préparateur physique passé par le club de rugby de Rouen, développe à Genève des méthodes de rééducation de la commotion : “En augmentant progressivement la charge visuelle et cognitive, en travaillant sur une simple tâche, puis avec du multi tâches, avant de solliciter le cardio.” 

L’ancien préparateur du Stade Toulousain invite à une plus forte prévention des traumatismes crâniens pour se prémunir d’un choc à la tête. “On peut travailler le système visuel, pour capter les informations plus vite, transmettre les réponses motrices adaptées pour pouvoir anticiper des chocs multiples lorsqu’on est athlète dans des sports collectifs ou de contact.”

Buysse a suivi la fin de saison des Gothiques depuis les tribunes. Et il ne sait pas s’il pourra repasser de l’autre côté de la balustrade. “Honnêtement, je me pose des questions, j’écoute aussi ma famille, je reste un compétiteur, mais si un médecin me dit que je ne peux plus jouer au hockey, j’arrêterai.” L’international vise les Mondiaux, prévus au mois de mai, avant de peut-être penser à sa reconversion. “Quand j’ai commencé ma carrière, il y avait une superstition comme quoi à six commotions il fallait arrêter. Je ne sais pas si c’est vrai mais je savais qu’arrivé là, il fallait que je commence à penser à arrêter…”

*interview réalisée le 23 février

Julien Benesteau

Crédit photo : Kevin Devigne – Gazette Sports

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