Ecole Bords de Somme : Entretien avec Victor Eonnet

Le mardi 22 juin, nous avons été à la rencontre de deux classes, une classe de CE2 et une classe de CM2, à l’école Bords de Somme. Les élèves, ont pu questionner Victor Eonnet, marin de cœur, évoquant sa vie en tant que skipper et ses prochaines compétitions, puisqu’il va participer à la Mini Transat pour la première fois en septembre 2021.

Comment te prépares-tu physiquement et mentalement pour la Mini Transat ?

La Mini Transat est quelque chose d’exigeant physiquement. J’ai un préparateur physique qui m’entraîne à avoir des muscles puissants. Je m’entraîne aussi à être endurant avec beaucoup de préparation cardiaque, pas beaucoup de course à pied mais du fractionné. J’ai un préparateur mental qui me permet de travailler des mises en situation, utiliser mes sens pour me reconcentrer et retrouver la motivation.

Te sens-tu prêt pour la Mini Transat ?

Oui je me sens prêt. Je me suis beaucoup entraîné. Ça fait j’ai trois ans que je m’entraîne et je commence à bien connaître mon bateau. J’ai hâte de prendre le départ. J’ai encore une course d’entraînement en juillet.

Après la Mini Transat, vas-tu garder ton bateau ?

Malheureusement non, après la Mini Transat je vais vendre mon bateau parce que c’est un bateau qui est fait quasiment que pour faire cette course. Je vais arrêter de naviguer sur ce type de bateau. Il sera vendu à un autre concurrent qui fera cette course dans 2 ans. Je serai très triste car je me suis beaucoup investi pour qu’il soit beau. À la vente du bateau je vais arrêter les courses temporairement.

Tu vas acheter un autre bateau ?

Le prochain bateau que j’aimerai avoir sera beaucoup plus grand et coûte beaucoup plus cher. Je ne peux pas l’acheter et il faut que je trouve des sponsors. C’est un gros projet, il reste encore beaucoup de travail.

Est-ce que parmi les autres navigateurs de la Mini Transat, il y a des amis à toi ?

Oui c’est un petit monde. Je m’entraîne dans un pôle d’entraînement. On est une vingtaine de concurrents et forcément on devient amis car on se voit très souvent.

As-tu déjà pensé à faire un métier en lien avec la navigation ?

Oui ! Actuellement je fais un travail un peu classique. Si j’arrive un jour à être skipper professionnel ce serait super mais il faut que je trouve des sponsors et les budgets sont assez impressionnants.

C’est quoi ta prochaine course après la Mini Transat ? Ce serait la transat Jacques Vabre ? Quel est ton rêve ?

Jusque-là c’était la Mini Transat et je vais le réaliser et mon rêve c’est le Vendée Globe.

Qu’est ce qui te donne envie de faire le Vendée Globe ?

C’est le dépassement de soi. C’est une épreuve extraordinaire et même si on ne gagne pas, le finir c’est extraordinaire.

Interview de Victor Eonnet à l’école Bords de Somme

Comment fais-tu si tu es malade, si tu te blesse ou si ton bateau se casse ?

J’ai une trousse à pharmacie avec un petit guide si je suis malade. Si on se blesse il faut se préparer car on se retrouve seul. Et si mon bateau se casse… en ce moment je fais la liste de tout ce qui peut se casser sur mon bateau et je fais des choix. J’ai un safran de secours que j’emmène par contre mon mât je ne peux pas en avoir un deuxième. J’ai une balise qui peut envoyer un signal de détresse vers un satellite qui renvoie le signal à un centre de détresse qui va coordonner les secours. Si un bateau vient c’est pour me récupérer et on abandonne le bateau. Il faut faire attention avant d’utiliser ce dispositif car on peut perdre son bateau alors que c’était réparable.

Comment fais–tu quand tu oublies ta bouteille d’eau ?

On a un contrôle de sécurité avant de partir en mer et l’organisation de la course vérifie qu’on a bien 4 litres d’eau par jour théorique de course. Quand je vais partir sur la 2ème étape de la Mini Transat ils partent du principe qu’on va mettre quinze jours à traverser et ils nous demandent de partir avec 60L d’eau. Il ne faut surtout pas boire l’eau de la mer car c’est plein de sel et ça ne réhydrate pas. J’ai fait un stage de survie pour m’expliquer les bons réflexes, si jamais je me retrouve sur mon canot de survie, on nous explique qu’il faut mieux boire son urine.

Ton bateau se trouve à la Turballe, ce ne se serait pas plus simple de t’installer là–bas ?

Oui ce serait plus simple. Je travaille chez Clarins. L’entreprise pour laquelle je travaille, m’a beaucoup aidé dans mon projet. Donc en fait c’est parce que je suis à Amiens et que je travaille chez Clarins que j’ai réussi à mener le projet. Ça aurait été plus simple au niveau logistique et organisation d’habiter là-bas mais je n’aurai pas eu tout le soutien de mon entreprise et je n’aurai pas pu mener ce projet.

As-tu peur d’être seul sur un bateau ?

Non je n’ai pas peur par car j’ai un peu l’habitude maintenant. Mais il faut s’habituer à se retrouver seul et ne pas partager quand ça va ou pas. Là quand on est tout seul on est obligé de tout garder pour soi et c’est un peu compliqué. Le lien manque.

Tu fais quoi si tu t’ennuies sur le bateau ?

Déjà on ne s’ennuie pas souvent et les cas où on s’ennuie c’est quand il n’y a pas vent du tout, mer d’huile, le bateau n’avance pas. Dans ces cas-là il faut amener de la lecture. Par exemple, j’ai un lecteur MP3 où j’ai plein de musique. Et puis comme je n’ai pas le droit d’avoir de tablette, je ne peux pas regarder de film et j’ai enregistré la bande audio de certains films que je connais très bien et je n’ai pas besoin d ‘avoir l’image pour savoir ce qu’il se passe et ça fait un son sonore. On n’a pas le droit de prendre son portable. Je le donne à l’organisation.

Pourquoi tu n’as pas le droit de prendre ton téléphone ?

La Mini Transat est l’une des dernières courses où il n’y a pas de téléphone et pas de moyens de communication entre les concurrents. Et la raison pour laquelle on lutte contre ça c’est qu’il y aurait certains concurrents qui auraient de meilleures informations que d’autres. Certains auraient les moyens d’avoir une équipe à terre qui leur donnerait les meilleures informations météo en permanence tandis que d’autres n’auraient pas les moyens et ça ferait un gros écart à la fin. L’avantage c’est que tous les concurrents reçoivent la même météo et c’est plus juste.

Comment feras-tu s’il y a une tempête ?

Il faut anticiper, préparer ses voiles, réduire la surface de voilure pour réduire la puissance du vent sinon le bateau se couche et n’est plus contrôlable.  Et puis il faut se préparer en se nourrissant bien avant, mettre de l’eau et des choses à manger à l’extérieur pour pouvoir être autonome pendant longtemps. Dans la zone tropicale où je vais, il y a des périodes de cyclones et l’organisation de la course les surveille, pour mettre des contraintes à la course, afin de ne pas qu’on aille dans ces zones-là car ça peut être dangereux.

Est-ce que c’est difficile de tout faire en même temps ?

J’ai mon métier et mon activité de skipper à côté qui peut s’apparenter à un deuxième métier et qui me prend tout mon temps libre mais ce n’est pas quelque chose pour laquelle je suis rémunéré. Il faut être organisé. La journée, j’ai mon travail, je me fais des plannings pour faire du sport, ma préparation mentale.

D’autres projets ?

Je cherche de l’argent pour la fondation Arthritis pour financer la recherche pour la thèse de Charles-Henry Miquel sur le lupus. Il cherche à savoir pourquoi les femmes sont plus touchées par cette maladie.

Pourquoi participer si vous savez que vous n’allez pas gagner ?

C’est un rêve de participer et de gagner. Ça me permet d’avoir une première expérience sérieuse. La passion est plus forte que la place. C’est une fierté de participer.

Comment fais-tu pour gérer ton travail, ta passion, tes amis et ta famille ?

Le week-end, je m’entraine ou je bricole sur mon bateau. Je consacre un week-end à ma famille ou mes amis. Il faut faire des pauses dans la vie.


Les élèves de CE2 et CM2 de l’école Bords de Somme.

Crédits Photos : GazetteSports

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