MIXITÉ : Jonatan Billon : “C’est un peu mon combat d’ouvrir la pratique à tous.”

Jonatan Billon est depuis un peu plus d’un an entraîneur à l’Amiens Métropole Natation dans la section natation artistique. Seul homme du club à pratiquer, il raconte son rapport à la discipline dans son quotidien.

Dans les gradins de la piscine du Coliseum, Jonatan Billon s’est confié sur sa pratique de la natation artistique. Plongé très tôt dans les bassins, il pratique la discipline depuis l’adolescence.

Comment êtes-vous tombé dans la natation et particulièrement la natation artistique ?

En fait, j’ai commencé à apprendre à nager dès l’âge de six ans, c’est ma mère qui voulait. A 13 ans, ma sœur a vu que la section natation artistique du club de ma ville rouvrait après quelques années de fermeture. Du coup, elle s’est relancée là-dedans, ma mère a voulu essayer et de fil en aiguille, je me suis lancé aussi. 

Qu’est ce qui vous a plu dans la natation artistique ?

J’ai accroché tout de suite en fait, par le challenge que cela apporte. Le travail est différent par rapport à celui qui est fait en natation classique. Faire des figures, garder de la hauteur en étant à l’envers et pas forcément juste nager. On va chercher des déplacements spécifiques et un peu gracieux, même si je ne le suis pas énormément (rires). 

La natation artistique est quand même un monde principalement féminin, comment se fait-on une place parmi les femmes ?

C’est vrai que cela peut être compliqué. Je le sais parce que mon frère a vécu une mauvaise expérience à ce niveau-là. Il a commencé un an après moi, il n’a pas été bien accueilli par les filles de son âge. Ça m’a un peu dégoûté car je trouvais qu’il pouvait faire de belles choses mais son expérience avec le groupe n’a pas aidé et ça l’a poussé à arrêter. Personnellement quand j’ai commencé, j’étais dans un groupe avec des personnes âgées de 20 à 30 ans qui m’ont très bien accueilli. L’intégration peut bien se faire ou pas. Pour ma part ça s’est très bien passé, j’ai bien accroché avec la discipline. Je sais que pour certains ça peut être plus compliqué. Il faut rester dans l’inclusion et ne pas repousser les autres.

“Ce qui me plait dans ce rôle-là c’est de montrer que ce n’est pas que pour les filles”

Jonatan Billon

Il n’y a en fait que très peu de garçons dans la natation artistique  ?

Oui. A l’heure actuelle je suis le seul garçon qui entraîne et pratique à l’Amiens Métropole Natation. Mais même au niveau national, on est très peu. A terme j’espère pouvoir recruter des garçons. C’est un peu mon combat d’ouvrir la pratique à tous.

Qu’est ce qui vous a poussé à devenir entraîneur ?

En fait, j’ai commencé parce que j’ai eu un parcours scolaire un peu compliqué. J’ai été déscolarisé un an, puis j’ai passé une semaine à ne rien faire et je me suis dit non, c’est pas possible. Donc je suis allé à la piscine avec mon entraîneur de natation pour voir comment cela se passait. De fil en aiguille, je me suis formé à encadrer les groupes d’écoles de natation classique. Puis je suis allé plus loin pour m’orienter vers la natation artistique. Ce qui me plaît dans ce rôle-là, c’est de permettre à tous d’accéder à la discipline, de montrer que ce n’est pas que pour les filles.

C’est en devenant entraîneur que vous avez décidé de mener ce combat ?

Oui on peut dire ça parce que ce que je recherche, c’est de pouvoir ouvrir la pratique à tout le monde mais aussi l’accès à la compétition à celles et ceux qui le veulent. Le sport, c’est avant tout s’amuser et découvrir des choses, ce qu’on fait dans la natation artistique ! On allie beaucoup de disciplines : la natation, la danse, la gymnastique, en une seule. C’est ça que je trouve beau ! Comme j’ai l’expérience en tant que nageur et entraîneur, je sais que chacun n’a pas les mêmes capacités. C’est mon rôle de m’y adapter pour former le ballet. Je sais que quand j’ai commencé, j’étais le seul garçon dans un groupe, la puissance et le fait de porter allaient être priorisés par rapport à la grâce.

Pratiquer un sport qui possède une image plutôt féminine, comment le vivez vous au quotidien ?

Comme j’ai commencé au collège, c’était l’âge des moqueries. J’ai reçu plusieurs fois des remarques ! Ça surprenait et il y avait beaucoup de préjugés. Ce n’était pas cool mais ça ne m’a pas empêché de continuer parce que je savais que c’était ce que je voulais. Le regard des autres n’était pas le plus important. Je fais ce que j’aime aujourd’hui en tant qu’entraîneur, donc c’est le principal.

César Willot
Crédit photo : Kevin Devigne – Gazette Sports

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