ARBITRAGE – TENNIS : On manque de vocations !

D’un côté, Daniel Cachera, 76 ans. De l’autre, Simon Van Overbeke, 20 ans. Leur point commun : la passion du tennis, vécue de l’intérieur grâce à leur parcours de juge-arbitre. Interviews croisées.

Président du RC Salouël Tennis, Daniel Cachera a d’abord joué au foot avant de découvrir le tennis à 35 ans, quand la discipline s’est popularisée, au début des années 1980. Le club de Salouël est créé à cette période, en 1983, l’année du dernier sacre d’un joueur français – Yannick Noah – à Roland-Garros… Dès 1984, Daniel Cachera devient président de son club. Comme partout, les joueuses et joueurs affluent. Le club compte une centaine de licenciés à la fin des années 1980, contre une quarantaine aujourd’hui. En parallèle, le président se forme pour devenir juge-arbitre. Aujourd’hui, Daniel Cachera est toujours juge-arbitre de la Coupe Michel-Sueur, une compétition par équipes réservée aux plus de 60 ans, qui s’est récemment étendue aux Hauts-de-France.

Moniteur de tennis à l’Amiens AC, où il a tapé ses premières balles, Simon Van Overbeke prend goût à la vie du club en devenant ramasseur, même s’il n’a pas eu l’honneur d’être sélectionné pour Roland-Garros. À 20 ans, il est en 3e année de STAPS. Il vise le Diplôme d’Etat d’éducateur de tennis mais, avec son goût pour l’organisation de tournois, Simon Van Overbeke s’est spécialisé dans le juge-arbitrage. Aujourd’hui JAT 2 (juge-arbitre de tournois niveau 2), il ambitionne une carrière de juge-arbitre international professionnel.

Pourquoi et comment êtes-vous devenus juges-arbitres ?
Daniel Cachera : Le club de Salouël venait d’être créé. Pour organiser des tournois et surtout pour composer les équipes qui jouent en championnat, il fallait un juge-arbitre. J’ai donc été formé au moment où je devenais président du club. J’arrêtais le foot pour être plus présent à la maison le dimanche mais le tennis allait me prendre beaucoup de temps aussi !
Simon Van Overbeke : J’ai débuté le tennis à 11 ans, ce qui est assez tard. J’ai tout de suite apprécié l’ambiance à l’AAC. Après avoir suivi les formations de ramasseur, j’ai voulu en savoir davantage sur le tennis et j’ai eu envie de m’investir. C’est assez rapide pour accéder au niveau 1 de juge-arbitre de tournoi, avec une partie théorique et une pratique. Ensuite, pour monter, c’est plus long avec toutes les connaissances à acquérir, à cause des responsabilités sur un tournoi.

Le juge-arbitre décide en dernier ressort

Simon Van Overbeke

Le juge-arbitre doit être incollable sur les règles du tennis mais son rôle est pourtant très différent de celui de l’arbitre de chaise, qui officie pendant les matchs ?
D. C. : Je n’ai jamais arbitré de match ni été juge de lignes. Ce sont effectivement deux rôles distincts. J’ai été juge-arbitre niveau 2, désigné plusieurs fois pour des matchs de l’AAC en championnat. Et s’il n’y a pas de juge-arbitre pour un match par équipes, c’est le responsable de l’équipe qui reçoit qui occupe la fonction…
S. V. O. le coupe : Non, non ! Maintenant, ce n’est plus comme ça… En tous cas, dans les championnats nationaux, les Interclubs l’été, c’est interdit ! Un juge-arbitre extérieur est désigné. S’il est du club, il va pencher pour son équipe…
D. C. l’interrompt : Non, parce que ce n’est pas le juge-arbitre qui décide si la balle est faute !
S. V. O. : Mais si le juge-arbitre est appelé pour une balle litigieuse, sur laquelle les joueurs ne sont pas d’accord et qu’il n’y a pas d’arbitre de chaise, il va devoir se prononcer. Le juge-arbitre décide en dernier ressort.

Le juge-arbitre doit rester discret

Daniel Cachera

Toujours est-il que juge-arbitre et arbitre de chaise ou juge de lignes, tous travaillent de concert…
S. V. O. : J’ai la chance de pouvoir découvrir les différentes tâches. J’ai été juge de ligne sur le tournoi ITF féminin de l’AAC. Dimanche dernier, j’étais à Clermont pour la même mission, la semaine précédente à Villeneuve-d’Ascq.
D. C. : Et comment ça se passe ? On t’appelle ?
S. V. O. : Oui, je fais partie d’un groupe d’arbitres. On reçoit les dates de différents événements et on nous demande si on est dispo.
D. C. : C’est bien quand on veut en faire sa profession. Moi, avec la fonction de président de club et ma casquette de joueur, j’étais déjà assez occupé ! (rires)
S. V. O. : Il faut aussi savoir qu’il y a la filière arbitres et celle des juges-arbitres. Arbitres A1, A2, A3 et ensuite les Badge, les arbitres internationaux. Pour les juges-arbitres, tu as soit juge-arbitre Tournois (JAT 1, JAT 2, JAT 3 puis internationaux) soit juge-arbitre Equipes. Et en plus, on peut devenir formateur de juges-arbitres. Le JAT 1 peut officier uniquement sur des tournois internes de son club. Personnellement, en tant que JAT2, je peux organiser des tournois jusqu’aux joueurs numérotés, dans la Ligue des Hauts-de-France. Ce que j’ai fait par exemple à Rivery, avec un tableau de 270 joueurs.
D. C. : Le juge-arbitre est quelqu’un qui doit rester discret. Avant une rencontre par équipes, c’est à lui d’interpeller les responsables d’équipes sur les cas particuliers éventuels. Comme vérifier la qualification des joueurs étrangers. Parfois ils viennent d’arriver et ne connaissent pas leurs coéquipiers.

Daniel Cachera, votre fierté en tant que juge-arbitre, c’est d’avoir développé la Coupe Michel-Sueur…

D. C. : Disons que je tiens beaucoup à la convivialité, alors cette manifestation (NDLR : créée en 1994 à la mémoire de Michel Sueur, joueur historique de l’AAC décédé peu avant) qui permet aux plus de 60 ans de s’affronter par équipes, s’est développée ces dernières années. Une quarantaine d’équipes, représentant autant de clubs, étaient engagées les premiers temps dans les trois départements picards. Mais avec la fusion des Régions Picardie et Nord – Pas-de-Calais puis des Ligues, nous avons voulu étendre la Coupe Michel-Sueur aux Hauts-de-France. Ce qui n’a pas été évident au départ mais le président de la Ligue des Hauts-de-France est intervenu en ce sens. Hélas, la pandémie est arrivée… Deux figures de l’organisation de la Coupe, Marie-Colette Guillermet et Frédérique Crèvecoeur, ont en plus pris leur retraite. Mais nous avons relancé l’événement avec une cinquantaine d’équipes et des poules géographiques cette saison, pour éviter les longs déplacements. Certains joueurs ont 80 ans passés ! Il y a trois groupes dans le Nord et dans l’Oise, deux dans la Somme, un dans l’Aisne et dans le Pas-de-Calais. J’établis les poules, j’envoie le calendrier et les équipes ont trois semaines pour organiser les matchs. Et ensuite, il y a les inter-poules. Et ça roule, en auto-arbitrage !

Simon Van Overbeke, il y a quelques conditions strictes à remplir pour devenir arbitre et juge-arbitre ?
S. V. O. : Pour être arbitre de chaise, il faut une bonne acuité visuelle. Si on porte des lunettes, on peut officier mais il y a une correction maximale à ne pas dépasser. Et pour devenir arbitre international ou juge-arbitre international, il faut maîtriser l’Anglais, le parler couramment en fait. Du coup, comme mon rêve est de devenir juge-arbitre international, j’ai été motivé pour améliorer mon Anglais !

Quels sont vos objectifs à court terme, concernant l’arbitrage dans le tennis ?
D. C. : Je continue parce que j’aime ça, même si à 76 ans, j’aimerais pouvoir passer le relais à la présidence du club… Mais ce n’est pas simple, alors en attendant la relève, ils me font confiance pour continuer à gérer toute la paperasse !
S. V. O. : J’essaye, depuis l’an dernier, de lancer des journées pour donner envie aux jeunes et aux moins jeunes de découvrir l’arbitrage, en suivant les formations. Il y a eu quelques inscrits mais pas assez. Dans un club comme le nôtre, avec 700 licenciés, on espère susciter quand même quelques vocations…

Textes et photos Vincent Delorme Gazettesports.fr

1 Comment

Leave a Comment

Your email address will not be published.

Start typing and press Enter to search