EDITO : GRACE AU SPORT, LE HANDICAP EST SEULEMENT UNE DIFFERENCE

J’ai marché jusqu’à mes 19 ans et 7 mois. Âgé de plus de 54 ans, je roule donc depuis plus de 35 ans. Ceci pour dire que je suis né « valide » et boulimique de sports jusqu’à l’aube de ma majorité quand j’ai été victime d’un infarctus médullaire. Je me suis essayé à plusieurs disciplines depuis mon plus jeune âge, En avril 1986 quand le handicap est arrivé dans ma vie, j’étais engagé et sélectionné pour faire partie des trois équipes de football, handball et basket-ball de notre établissement.

La caractéristique majeure du handicap qui survient dans une vie, c’est qu’il focalise toutes les attentions sur l’idée ou l’envie de pouvoir le repousser pour que la victime retrouve sa vie d’avant. Plus l’on a des chances d’y arriver plus l’envie devient obsessionnelle. Je n’ai pas échappé à cette réalité. J’ai connu près de 3 années d’immobilité tant sur le plan physique, que moral, pas de projets, pas d’ambitions, et surtout pas ou plus de sport. Au fur et à mesure que passe le temps, rien ou presque ne se passe sur le chemin de la guérison.

J’ai eu la chance et la grâce en 1988 de bénéficier d’un tricycle qui m’a permis de retrouver la pratique d’une activité physique. J’ai le souvenir d’être parti de chez moi et d’avoir roulé durant des heures et des heures pour le simple plaisir de déployer un effort physique. Sur cette sortie, j’étais en autonomie totale, pour la première fois depuis mon arrivée dans le monde des « handi ». Je ne peux décrire l’état d’extase dans lequel je suis revenu ce jour-là. J’estime aujourd’hui que ce jour a marqué le début définitif de ma nouvelle vie. Je pouvais de nouveau sortir, de nouveau partir, de nouveau aller, de nouveau bouger, changer de lieu et d’environnement.

C’est un retour à la vie, c’est une renaissance, surtout après 3 années de confinement imposé par le handicap. Je prie chacune et chacun d’imaginer nos concitoyens, nos contemporains qui seraient dans un état plus ou moins déplorable que le mien en ce moment-là, et qui attendent plus ou moins consciemment ce jour du retour à la vie, ce jour où on peut leur proposer de faire quelque chose qui change leur quotidien. Grâce au sport, ou grâce à mon envie de pratique, j’ai pu retrouver et reprendre la compétition en équipe car c’est dans le sport collectif que je m’épanouis le plus. C’est le « sport co » qui m’a permis de comprendre que je suis important pour mon équipe, je suis important pour ma ville, je suis important pour mon pays et je suis important pour le monde dans lequel je vis.

Ce que je ressens quand je fais du sport, est le fondement et le leitmotiv du sportif que je suis, du meneur que je suis. Il m’a fallu 3 ans pour reprendre goût à la vie, mon combat de tous les jours est d’aider mes contemporains qui se retrouveraient dans une situation semblable à ne pas perdre autant d’années que moi. Le sport pour tous est une réalité à laquelle j’adhère complètement et que je souhaite à tous les Samariens en situation de handicap. En tant que Président du Comité Départemental Handisport de la Somme, je dis merci à tous les présidents des clubs et sections affiliés à la Fédération Française Handisport, à tous les encadrants et tous les bénévoles qui œuvrent dans ce sens. Merci pour ce que fait le sport adapté pour nos amis en situation de handicap psychique, nous sommes tous engagés dans le grand bateau du sport pour tous.

Je sais qu’il existe plusieurs localités dans notre département qui manquent de structures permettant aux personnes en situation de handicap de pratiquer une activité physique, nous sommes à la disposition des élus de la Région, du Département et des communes pour que le sport soit une réalité pour tous indépendamment de la situation dans laquelle l’on peut se trouver ou se retrouver. Pour finir, je vais avouer une dernière chose, moi qui suis d’ici et d’ailleurs, le sport m’a donné une famille et après plus de 10 ans de présidence m’a permis de former une famille dans laquelle plusieurs m’appellent Tonton. Pour le mouvement handisport, je suis aussi élu vice-président du Comité Régional Handisport de Hauts de France et Président de l’association Handisport Amiens Métropole.

J’ai la grâce d’être le mari d’une femme qui m’aime très fort, le fils d’une maman aimante, le frère d’une fratrie de 7 enfants, le papa d’une fille qui m’honore, le beau-père d’un gendre qui me considère comme le papa qu’il n’a pas connu lui qui est orphelin de père, et le tonton aimé de ses neveux et nièces. Je suis le grand père de 3 petits enfants qui s’extasient quand ils me voient en visio malgré les 6000km qui nous séparent, je suis le tonton de sang et par alliance de beaucoup, et surtout le tonton de cœur de plusieurs dans le sport en général et le handisport en particulier.

Pour tout ce que je viens d’affirmer et qui est vérifiable, j’espère vous avoir montré que grâce au sport, j’ai réussi à laisser que le handicap indique ce que je suis sans définir qui je suis. Handicap ne rime ni avec immobilité, ni avec fin de vie, je souhaite cette compréhension à tous mes frères en humanité.



Joseph MBONGO

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