FOCUS CLUB – L’AJSS se fait sa place en misant sur la santé

Sur Amiens, dans l’ombre de l’ASC Judo, de nombreux clubs essayent de se démarquer. Parmi ceux-ci, attardons-nous un peu sur l’Amiens Judo Santé Solidarité (AJSS), une structure qui mise sur le judo, mais pas que. 

Le judo est un des arts martiaux les plus pratiqués en France, avec pas moins de 530 000 licenciés. En plus de cela, on dénombre 5300 clubs affiliés à la Fédération Française de Judo (FFJ). Sur Amiens, deux structures se démarquent : l’ASC Judo et le Pôle Excellence. Pourtant, aucune de ces deux structures ne sera le sujet. En effet, nous allons parler d’un club plus petit, moins médiatiser, fondé sur « un désir de créer un club qui soit ouvert et vraiment spécifique aux personnes handicapées et aux personnes qui ont des maladies chroniques, enfants et adultes. »

Les enjeux de la création

Depuis 2018, l’AJSS est une des structures proposant plusieurs arts martiaux sur Amiens. Si l’offre est assez variée, avec du judo, assez logiquement, du karaté, mais aussi du taïso, c’est-à-dire de la gym douce, du kendo, du self-défense et du chanbara, il s’avère que derrière la création de ce club se cache un terrible constat, partagé par René Faure, président du club : « Il n’y a pas de club orienté vers ce type de personnes. Il y a des clubs qui ont des sections ou qui les accueillent individuellement plus ou moins bien. » Si pendant trop longtemps, l’accueil de personnes en situation de handicap était compliqué de par les enjeux et l’encadrement nécessaire, c’est désormais une des priorités, notamment au niveau de l’État. Il faut « développer le sport chez les personnes handicapées et les personnes portant des maladies chroniques. On s’est rendu compte que ce qu’on appelle le sport médicament, c’est-à-dire le sport pour les personnes malades chroniques, va améliorer à la fois le traitement, le pronostic, le retard d’entrée en dépendance. Ce n’est que du positif. »

René Faure, président de l’AJSS

C’est donc avec l’objectif de proposer un club capable d’accueillir que René Faure, Florence Obel et Denis Reymann ont créé l’AJSS. Pourtant, si le sport médicament et handicap est leur fer de lance, ils proposent également du sport santé ainsi que des créneaux pouvant répondre à toutes les envies, que ce soit loisir ou compétition. L’actuel président développe un peu plus sur le sport santé : « Principalement, c’est ce qu’on appelle le taïso, la gym douce et un petit peu le karaté. » Car en judo, certains groupes peuvent s’avérer « trop dynamique », mais la possibilité d’ajouter un créneau est en discussion. Concernant le sport handicap, « on a plutôt le judo, puisqu’on a des groupes homogènes, notamment le mercredi après-midi. On a un groupe d’un foyer de vie, des personnes handicapées. On a un groupe taïso, qui vient le lundi après-midi, d’un foyer de vie aussi. Et on a des intégrations individuelles. » En plus de cela, ils travaillent de consort avec des hôpitaux ainsi que des associations pour proposer des séances. Ces dernières se font sur Amiens si le déplacement est faisable, ou bien les instructeurs se déplacent directement sur place dans le cas échéant.

A l’occasion d’un stage de vacances, l’AJSS nous a ouvert ses portes

Pour René Faure, son souhait est assez simple : contribuer à leur santé. Et cela passe, dans le cas de certains, par « la convivialité, la socialisation, qu’ils sortent de leur établissement ou, quand ils sont à domicile, qu’ils puissent rencontrer d’autres personnes, y compris dites « normales ». » Tandis que pour les pratiquants du sport-handicap, « c’est maintenir les acquis. Parce qu’ils vivent « plus vite » que les autres. Ils ont aussi des traitements lourds, donc il faut un petit peu surmonter les effets des traitements. Donc c’est d’abord maintenir leurs capacités en premier temps. Et pour les personnes qui ont des maladies chroniques, on sait que ça va améliorer leur situation. Donc ça va jouer surtout sur l’espérance de vie, sur l’autonomie, sur le plaisir, le moral, etc. »

L’impact du Covid sur les plus jeunes

Mais, ces dernières années, depuis le Covid, un autre facteur est entré en jeu, le manque d’activités physiques auprès des plus jeunes, nouveau fléau de notre société. « Les pédiatres disent que les enfants, alors ça va être précisé puisque maintenant, on va faire des évaluations en sixième, ont perdu 20 à 30% de leurs capacités physiques. Donc c’est dramatique puisque c’est comme si à 11 ans, ils avaient déjà 70 ans. Donc il faut absolument réintroduire de la pratique sportive chez les enfants, pour un petit peu contrebalancer l’addiction aux écrans. Et donc nous, on pense qu’il faut intervenir dans les écoles, mais aussi dans les IME, là où sont les enfants en précarité par exemple, qui sont suivis par l’aide sociale à l’enfance, dans la protection judiciaire à la jeunesse, trouver là où sont les enfants pour essayer de les sensibiliser à la pratique sportive. Après, qu’ils viennent chez nous ou ailleurs, l’essentiel, c’est d’initier, de commencer. Donc c’est vraiment un peu faire le premier pas avec eux et après, c’est à eux de découvrir et de continuer de façon pérenne. »

Denis Reymann a suivi son collègue dans une nouvelle aventure

Des échanges pour apprendre

René Faure et Denis Reymann n’en sont pas à leur première association. De fait, les deux compères ont déjà fondé Mocapi, une association d’échanges avec la Roumanie et la Moldavie, il y a 20 ans. Forcément, dès 2018 et la fondation de l’AJSS, un aspect international est venu avec, dans la continuité des échanges de judo ayant déjà lieu depuis 2013. Les échanges ne sont pas que sportifs, mais touchent également les domaines de l’éducation, de la santé et de la culture. « Ce qui est formidable, c’est que les enfants, à travers les différences de langues et de cultures, ils vont, comment dire, échanger à travers le judo. Le judo va être un vecteur d’échange«  confie le président. Bien évidemment, faire venir des judokas étrangers n’est pas facile, mais il s’avère que le plus compliqué est de « faire partir les Français en Roumanie ou en Moldavie. » Actuellement, la guerre en Ukraine ne facilite pas la tâche, mais ce problème survenait déjà avant le début de ce conflit. Ce n’est pas pour autant que René Faure se laisse faire et il sait et souhaite vraiment « arriver à faire des séjours en Roumanie avec nos judokas français. Puisqu’on n’y est arrivé qu’en 2019, avec des enfants et des adultes handicapés d’un IME et de l’hôpital Pinel. »

L’AJSS est un club basé sur l’accueil de personnes en situation de handicaps ou atteintes de maladies chroniques. Pourtant, ils diversifient leurs offres pour accueillir et motiver les licenciés à pratiquer ce sport. Encore dans l’ombre des clubs de compétition, la structure commence à se faire sa place, ayant atteint la barre des 140 membres cette année.

Cyprien Baude
Crédit photo : Théo Bégler – Gazettesports.fr

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